Mémoire à l’OCDE : indépendance des autorités de la concurrence

Le 2 décembre 2016

1. Introduction

Le Bureau de la concurrence (« le Bureau ») est heureux de soumettre le présent document à la table ronde « Indépendance des autorités de la concurrence : des intentions aux pratiques » du Forum mondial de l’OCDE sur la concurrence.

L’indépendance des autorités d’application des lois sur la concurrence en matière d’enquêtes, de décisions d’application des lois et de procédures judiciaires est cruciale à leur crédibilité. En même temps, à titre d’organisations gouvernementales, les autorités de la concurrence doivent rendre compte de leurs dépenses et faire preuve d’une transparence maximale. Il peut être difficile de choisir un modèle institutionnel permettant d’équilibrer ces considérations. Comme il a été souligné dans la documentation préparée par le Secrétariat à l’intention de la présente table ronde, les variations de systèmes juridiques et de normes culturelles peuvent faire en sorte que ce qui fonctionne pour un pays ne convienne pas à un autre.

La première loi sur la concurrence du Canada a été édictée en 1889Footnote 1. Après une longue période caractérisée par des résultats partagés en matière d’application de la loi et certaines décisions judiciaires limitant la portée effective de la loi sur la concurrence, le gouvernement canadien a créé le Conseil économique du Canada à la fin des années 1960. Ce dernier avait pour mission d’étudier les lois et les institutions du Canada se rapportant à la concurrence et de formuler des recommandations en vue d’une réformeFootnote 2. En 1986, conformément aux recommandations obtenues et après près de 100 ans d’expérimentation avec divers modèles institutionnels en matière d’application des lois sur la concurrence, le gouvernement a mis en place un modèle institutionnel à deux branchesFootnote 3. Selon ce modèle, le Bureau, au nom du commissaire de la concurrence (« le commissaire »), enquête sur les affaires liées à la concurrence, lesquelles peuvent ensuite être soumises aux tribunaux judiciaires ou à un tribunal spécialisé, le Tribunal de la concurrence (« le Tribunal »). Ce modèle institutionnel n’a subi que des changements mineurs au cours des 30 dernières annéesFootnote 4.

La combinaison des protections prévues dans la Loi sur la concurrence (« la Loi »)Footnote 5, de la structure institutionnelle à deux branches et d’une culture forte de fonction publique indépendante et non partisane se traduit par une grande indépendance du système canadien d’application des lois sur la concurrence.

La première partie de cette présentation décrit les institutions responsables des politiques sur la concurrence et de l’application des lois en la matière au Canada. La deuxième partie porte sur les liens entre le Bureau et d’autres organismes du gouvernement, y compris Innovation, Sciences et Développement économique Canada (ISDE), le ministère d’attache du BureauFootnote 6.

2. Institutions

Les institutions du Canada liées aux politiques sur la concurrence et à l’application des lois en la matière sont les suivantes :

  • le Parlement;
  • ISDE;
  • le Bureau;
  • le Tribunal;
  • les Services juridiques, Bureau de la concurrence (SJBC) du ministère de la Justice;
  • le Service des poursuites pénales du Canada (SPPC);
  • les tribunaux judiciaires provinciaux, territoriaux et fédéraux.
Tableau 1 : Enquêtes, litiges et décisions en matière de concurrence au Canada
Type d’affaireFootnote 7 CivileFootnote 8 CriminelleFootnote 9
Enquêtes Bureau Bureau
Litiges SJBC (soutien juridique au Bureau) SPPC (compétence exclusive dans les affaires qui lui sont renvoyées par le Bureau)
Décisions

Tribunal

Cours supérieures provinciales ou territoriales de juridiction criminelle
Appels Cour fédéraleFootnote 10, Cour d’appel fédérale, Cour suprême du Canada (sur autorisation) Cours d’appel provinciales ou territoriales, Cour suprême du Canada (sur autorisation)

Le Parlement

Le Bureau présente un rapport annuel au Parlement, conformément à la Loi. Les rapports annuels sont préparés par le Bureau et déposés à la Chambre des communes par le ministre d’ISDE. Le Bureau comparaît aussi régulièrement devant des comités parlementaires pour fournir des renseignements et répondre à des questions sur des sujets comme ses activités d’application des lois, ses activités en matière de politiques, ses propositions législatives et les conditions de concurrence dans des industries données.

ISDE

ISDE est un ministère du gouvernement fédéral du Canada dont les travaux portent sur une grande variété de dossiers liés à l’industrie et à la technologie, aux échanges, au commerce, à la science, à la consommation, aux sociétés par actions et aux valeurs mobilières, à la concurrence et aux restrictions du commerce, à la faillite et à l’insolvabilité, à la propriété intellectuelle et à l’investissement. Le mandat du ministère est de « contribuer à rendre l’industrie du pays plus productive et plus concurrentielle dans l’économie mondiale, et d’améliorer ainsi le bien‑être social et économique des Canadiens »Footnote 11. L’un des principaux résultats stratégiques recherchés par ISDE est d’élaborer des politiques propices à la concurrence et suscitant la confiance des consommateurs, des investisseurs et des entreprises. En vue d’atteindre ce résultat, ISDE a mis au point un programme d’innovation « de manière à accroître la qualité et à améliorer l’incidence de nos programmes à l’appui de l’innovation, de la recherche scientifique et de l’entreprenariat »Footnote 12.

Le Bureau

Le Bureau est un organisme relevant d’ISDE qui prend des décisions de manière indépendante en ce qui concerne l’application de la Loi. Le Bureau enquête sur les pratiques et fusions anticoncurrentielles potentielles. Seuls le Tribunal et les tribunaux judiciaires sont habilités à déterminer s’il y a eu violation de la Loi et à imposer des sanctions ou à rendre des ordonnances. En matière de fusions et de comportements susceptibles d’examen, l’article 105 de la Loi donne au commissaire et aux parties pertinentes la possibilité de signer un consentement. Une fois enregistré auprès du Tribunal, un tel consentement a la même valeur et produit les mêmes effets qu’une ordonnance du Tribunal. Un consentement doit porter sur le contenu de toute ordonnance qui pourrait être rendue contre la personne en question par le Tribunal.

Dans le cadre de son mandat, le Bureau participe également à une vaste gamme d’activités de promotion des avantages d’un marché concurrentiel. Les articles 125 et 126 de la Loi autorisent le commissaire à témoigner devant les organismes fédéraux et provinciaux qui supervisent les industries réglementées afin de faire la promotion d’une concurrence accrue dans divers secteurs de marchés.

Le Tribunal

Le Tribunal tranche les affaires civiles liées au droit de la concurrence. Il s’agit d’un tribunal spécialisé composé de membres judiciaires et d’autres membres possédant une expertise en économie, en finance, en comptabilité ou en marketing. Le Tribunal est un organisme strictement décisionnel, indépendant de tout ministère. Le conseil des ministres fédéral nomme les membres du Tribunal selon les conseils du ministre de la Justice ou du ministre d’ISDEFootnote 13. Les membres sont nommés pour une durée déterminée d’au plus sept ans et leur mandat peut être renouveléFootnote 14.

Le ministère de la Justice (SJBC)

En ce qui concerne les affaires civiles, le Bureau est appuyé par les SJBC, une unité de services juridiques du ministère de la Justice qui lui est réservée et qui occupe les mêmes locaux que le Bureau. Les SJBC fournissent des services et des conseils juridiques et représentent le Bureau dans les affaires civiles traitées par le Tribunal ou les tribunaux judiciaires.

Le SPPC

Le SPPC est chargé des poursuites judiciaires relatives à des infractions criminelles qui relèvent de la compétence fédérale. Dans les affaires où le Bureau estime qu’il y a lieu de porter des accusations, le Bureau renvoie au SPPC les éléments de preuve concernant les infractions criminelles présumées ainsi que ses recommandations de poursuite, y compris son avis quant à la peine appropriée. Le SPPC décide alors s’il convient d’intenter une poursuite et la façon de procéder. Il a la compétence exclusive d’entreprendre des discussions avec l’avocat de l’accusé au sujet du plaidoyer de la peine. Le Bureau continue à appuyer activement la poursuite, notamment en présentant les faits et en fournissant une analyse à l’avocat du SPPC au cours des discussions concernant le plaidoyer et la détermination de la peine. Le SPPC tient dûment compte des recommandations du BureauFootnote 15.

Les tribunaux judiciaires

Au Canada, la responsabilité du système judiciaire est partagée entre le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux et territoriaux. Seul le gouvernement fédéral a le pouvoir de nommer et de payer les juges des cours supérieures des provinces et des territoires. Le Parlement a la compétence exclusive en matière de procédures des cours criminelles, ce qui permet d’assurer l’uniformité du traitement des comportements criminels dans l’ensemble du pays. Les provinces et les territoires administrent la justice dans leurs compétences, ce qui comprend l’organisation et le maintien des tribunaux civils et criminels provinciaux et territoriaux, de même que les procédures civiles dans ces coursFootnote 16.

3. Liens avec le gouvernement

Cette section porte sur les liens entre le Bureau et ISDE. Il y est aussi question des relations entre le Bureau et d’autres ministères et organismes du gouvernement fédéral.

3.1 Le Bureau et ISDE

Le Bureau relève d’ISDE; à ce titre, le commissaire doit rendre compte au sous‑ministre d’ISDE sur les questions financières et administratives. Le Bureau établit ses propres priorités, mais tient compte de celles d’ISDE et du gouvernement fédéral dans son ensemble. Le Secteur de la politique stratégique d’ISDE se charge d’élaborer les politiques et les propositions législatives en matière de concurrence. Le Bureau collabore avec ISDE dans le cadre du processus d’élaboration des politiques.

Sur les questions d’application des lois, le commissaire rend compte au Parlement par l’intermédiaire du ministre d’ISDE. Le Bureau administre ses activités d’application des lois de manière indépendante, à quelques exceptions près (la question sera approfondie ci‑dessous). La Loi établit clairement les rôles du ministre d’ISDE et des autres ministres en ce qui a trait à l’application des lois et aux activités de promotion liées à la concurrenceFootnote 17. Ces protections juridiques sont appuyées par une solide culture de séparation entre les activités politiques et les activités non partisanes du gouvernementFootnote 18. La fonction publique accorde aussi une grande importance à la valeur clé du « respect de la démocratie ». Comme il est énoncé dans le Code de valeurs et d’éthique du secteur public, « [l]es fonctionnaires reconnaissent que les élus sont responsables devant le Parlement et, par conséquent, devant la population canadienne, et qu’un secteur public non partisan est essentiel à notre système démocratique »Footnote 19. Iacobucci et Trebilcock (2013) ont constaté lors d’entrevues avec d’anciens commissaires que [TRADUCTION] « toutes les personnes interrogées étaient d’avis qu’aucune de leurs décisions comme commissaires dans des dossiers particuliers n’avait été influencée par le ministre ni son personnel politique et, de fait, qu’aucune tentative n’avait été faite en ce sens »Footnote 20.

Ce modèle permet au Bureau de profiter de son intégration à ISDE et à la fonction publique en général en ce qui a trait à la reddition de compte, à la transparence et à l’efficience tout en conservant un niveau d’indépendance élevé quant à l’application des lois.

3.1.1 Application des lois

Comme il a été mentionné précédemment, la Loi régit la relation entre le ministre d’ISDE et le Bureau quant à l’application des lois. Certaines dispositions créent des protections juridiques qui assurent l’indépendance du commissaire sur ces questions. Si certaines dispositions permettent au ministre de donner des instructions au commissaire dans certaines circonstances particulières, elles ont très rarement été appliquées en pratique.

Enquête par le commissaire

Après une enquête initiale, le commissaire peut ouvrir une enquête officielle sous le régime de l’article 10 de la Loi lorsqu’il a des raisons de croire :

  • soit qu’il existe des motifs justifiant une ordonnance en vertu des dispositions civiles de la Loi;
  • soit qu’une personne a contrevenu à une ordonnance rendue en application des dispositions susmentionnées;
  • soit qu’une infraction visée aux termes des dispositions criminelles de la Loi a été perpétrée ou est sur le point de l’être.

La plupart du temps, le Bureau sera en mode enquête avant d’avoir recours à ses pouvoirs officiels de collecte d’information.

Selon l’alinéa 10(1)c), le commissaire doit ouvrir une enquête officielle chaque fois que le ministre le lui ordonne en vue de déterminer si l’une des situations énumérées ci‑dessus existe. Cependant, le commissaire n’est pas tenu de prendre quelque mesure d’application des lois que ce soit si les circonstances ne le justifient pas. En ce qui concerne la promotion de la concurrence, le paragraphe 125(1) permet au ministre, de la même manière, d’ordonner au commissaire de présenter des observations concernant la concurrence devant les offices, les commissions ou les tribunaux fédéraux. En pratique, ces dispositions sont très rarement appliquées.

Le paragraphe 10(3) prévoit que toutes les enquêtes du Bureau doivent être conduites en privé. Il arrive parfois que le fait que le Bureau examine une question soit rendu public par un plaignant, une autre partie ou par des documents judiciaires accessibles au public. Lorsqu’un dossier a été éventé dans le grand public, le Bureau peut confirmer qu’une enquête est en cours.

Confidentialité

L’article 29 interdit aux employés du Bureau, y compris le commissaire, de communiquer à quiconque, sauf à un organisme canadien chargé de l’application des lois ou aux fins de l’application de la Loi, des renseignements obtenus dans le cadre de son travail d’application des lois. La protection de l’article s’applique de fait à tout renseignement fourni au Bureau ou obtenu par celui‑ci dans le cadre de l’exécution de son mandat.

Rapport provisoire au ministre

Sous le régime de l’article 28, le ministre peut requérir un rapport provisoire sur toute enquête ouverte sous le régime de la Loi. Le commissaire doit alors présenter un rapport « indiquant les mesures prises, la preuve obtenue et son opinion sur l’effet de la preuve »Footnote 21. Encore une fois, il s’agit d’une disposition dont l’application est extrêmement rare.

Rapport sur les discontinuations

Sous le régime de l’article 22 de la Loi, le commissaire peut discontinuer une enquête officielle lorsqu’il estime que l’affaire étudiée ne justifie pas la poursuite de l’enquête. Selon le paragraphe 22(2), le commissaire doit remettre un rapport au ministre lorsqu’une enquête est discontinuée. Le paragraphe 22(4) donne au ministre le pouvoir de réviser la décision de discontinuer une enquête et, s’il estime que les circonstances le justifient, d’ordonner au commissaire de la poursuivre. Encore une fois, le commissaire n’est en rien tenu de prendre des mesures d’application des lois s’il maintient sa conclusion (selon laquelle l’enquête devrait être discontinuée) une fois l’enquête poursuivie.

3.1.2 Budget

Le Bureau est financé par une combinaison de fonds publics et de frais. Le pouvoir de dépenser des fonds du gouvernement et de percevoir des frais (selon certaines estimations)Footnote 22 lui est accordé annuellement par le Parlement. Le budget du Bureau fait partie du budget d’ISDE.

Le financement du Bureau a été relativement stable au fil des annéesFootnote 23.

Tableau 2 : Budget du Bureau de la concurrence selon l’exercice (2011‑2016)Footnote 24
Exercice 2011‑2012 2012‑2013 2013‑2014 2014‑2015 2015‑2016
Budget total 51,4 millions $ 51 millions $ 48,8 millions $ 49,1 millions $ 49,3 millions $
Portion tirée des frais 10,2 millions $ 10,6 millions $ 10,5 millions $ 10,4 millions $ 10,5 millions $

Le Bureau rend compte au sous‑ministre d’ISDE sur les questions administratives et financières, y compris la planification financière et la planification des activités. Certaines catégories de dépenses doivent être approuvées par le ministère (sous‑ministre ou ministre, selon la somme en cause), notamment les dépenses de déplacement et d’hébergement qui ne sont pas directement liées aux activités d’application des lois, par exemple les déplacements vers des réunions bilatérales avec des homologues étrangers, les rencontres avec des organisations multilatérales et autres conférences. Seul le commissaire doit approuver les dépenses de déplacement liées aux activités d’application des lois, ce qui permet d’assurer l’indépendance du Bureau sur ces questions.

3.1.3 Ressources humaines

Le Bureau est dirigé par un seul administrateur général. Le commissaire est nommé par le conseil des ministres (le gouverneur en conseil) sur recommandation du ministre d’ISDE. Le bureau du commissaire fait partie d’environ 1 500 postes au gouvernement fédéral qui sont dotés sur nomination du gouverneur en conseil. Pour chaque nomination, des critères de sélection sont fixés en vue de refléter les besoins de l’organisation et les compétences requises. Les candidats sont évalués en fonction des exigences du poste. Les postes à combler sont affichés par une variété de méthodes. Les personnes peuvent être nommées à titre inamovible (le mandat ne peut être révoqué que pour un motif valable) ou à titre amovible (le mandat peut être révoqué selon le bon vouloir du gouverneur en conseil)Footnote 25. Le commissaire est nommé à titre amovible. Cependant, à notre connaissance, il n’est jamais arrivé qu’un ministre révoque le mandat d’un commissaire.

Le processus de nomination par le gouverneur en conseil varie selon la nature du poste. Des processus rigoureux s’appliquent aux nominations cruciales comme celle d’un dirigeant d’organisme. Dans ces cas, le processus de sélection est coordonné par le Bureau du Conseil privé au nom du Cabinet du premier ministre. Pour toutes les autres nominations, les ministres et leur cabinet sont responsables de déterminer le processus de sélection avec l’aide de leur ministèreFootnote 26.

Le commissaire est nommé pour une durée de cinq ans, son mandat chevauche donc souvent des gouvernements issus de partis politiques différents. Son mandat est renouvelable, mais le commissaire en poste doit se soumettre de nouveau au processus de sélection complet s’il désire rester en place. Le commissaire prête aussi un serment d’impartialité lors de sa nomination, conformément à la LoiFootnote 27.

Le commissaire est responsable de la dotation régulière du Bureau. La nomination des cadres du Bureau doit être approuvée par le sous‑ministre d’ISDE. Les processus de dotation suivent des politiques établies communes à tous les ministères et organismes fédéraux. La Commission de la fonction publique est responsable de protéger, de façon indépendante, l’intégrité du système de dotation et le caractère non partisan de la fonction publique. La responsabilité de la dotation est déléguée aux sous‑ministres avec l’assurance qu’ils se conformeront au cadre législatif et politique établiFootnote 28. Les employés du Bureau sont des employés d’ISDE, mais relèvent des dirigeants du Bureau.

3.2 Le Bureau et les autres ministères et organismes

Sur certains domaines économiques assujettis à la réglementation fédérale, le Bureau travaille aussi avec d’autres ministères et organismes du gouvernement fédéral dans le cadre de ses activités d’application des lois, de promotion et de sensibilisation.

Fusions

Selon l’article 94 de la Loi, les ministres fédéraux concernés peuvent exercer leur compétence à l’égard d’un projet de fusion dans deux industries, celles de la finance et du transport. Ces ministres demandent généralement l’avis du Bureau sur les questions de concurrence et sur les mesures correctives potentielles et tiennent compte de cet avis au moment de décider si la fusion est dans l’intérêt public. Les dispositions de la Loi concernant la confidentialité permettent la communication de renseignements confidentiels au ministre des Finances et au ministre des Transports aux fins de tels examens des fusions.

Outre les exceptions prévues à l’article 94 de la Loi, d’autres organismes gouvernementaux peuvent mener des examens portant sur l’intérêt public de façon parallèle à l’examen du Bureau, sans toutefois le supplanter. Par exemple, les fusions qui requièrent un examen aux termes de la Loi sur Investissement CanadaFootnote 29 concernent l’acquisition par des étrangers d’une entreprise canadienne et sont soumises au critère de « l’avantage net », lequel tient compte d’une grande variété de facteurs d’intérêt public, y compris l’incidence potentielle sur la concurrence. Aussi, le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC) et le ministre d’ISDE ont une compétence parallèle à celle du Bureau en ce qui concerne l’examen des fusions dans le secteur de la radiodiffusion.

Promotion et sensibilisation

Dans ses activités de promotion et de sensibilisation, le Bureau collabore souvent avec d’autres ministères et organismes gouvernementaux. Par exemple, le Bureau fait des efforts de sensibilisation continus auprès des employés des organismes responsables de l’approvisionnement, y compris Services publics et approvisionnement Canada, le principal organisme d’approvisionnement du gouvernement fédéral, afin de les aider à repérer le truquage des offres. Le Bureau participe également aux procédures de réglementation, comme les audiences du CRTC sur les questions de télécommunications et de diffusion, en donnant son opinion sur l’incidence qu’auraient les politiques proposées sur la concurrence. En 2014, à la demande des ministres des Ressources naturelles et de l’Industrie, le Bureau et l’Office national de l’énergie ont effectué un examen conjoint de certaines questions liées au marché du propane au CanadaFootnote 30. Les initiatives de promotion du Bureau comprennent souvent des discussions et de la coopération, de façon officielle ou informelle, avec d’autres organismes gouvernementaux. Cette coopération est facilitée par un certain nombre de protocoles d’entente conclus entre le Bureau et d’autres organisationsFootnote 31.

4. Conclusion

Il peut être difficile de trouver et de maintenir l’équilibre entre l’indépendance et la reddition de compte. Au Canada, malgré l’intégration du Bureau à ISDE en ce qui concerne l’élaboration des politiques, les finances et l’administration, le cadre juridique et culturel lui assure une grande indépendance de fait dans ses activités d’application des lois. Ce modèle assure les parties concernées que les décisions d’application des lois sur la concurrence ne seront pas fondées sur des priorités politiques changeantes, mais sur des enquêtes impartiales. Parallèlement, il fait en sorte que le Bureau doit rendre compte au public de son fonctionnement conforme aux valeurs de la fonction publique que sont l’impartialité et la saine gestion des ressources.

Annexe — Dispositions pertinentes de la Loi sur la concurrence

Commissaire de la concurrence

7 (1) Le commissaire de la concurrence est nommé par le gouverneur en conseil; il est chargé :

  • d’assurer et de contrôler l’application de la présente loi;
  • d’assurer l’application de la Loi sur l’emballage et l’étiquetage des produits de consommation;
  • de contrôler l’application de la Loi sur l’emballage et l’étiquetage des produits de consommation, sauf en ce qui a trait aux aliments, au sens de l’article 2 de la Loi sur les aliments et drogues;
  • d’assurer et de contrôler l’application de la Loi sur le poinçonnage des métaux précieux et de la Loi sur l’étiquetage des textiles.

Serment professionnel

(2) Préalablement à son entrée en fonctions, le commissaire prête et souscrit ou fait, selon le cas, le serment ou l’affirmation solennelle, tels qu’ils sont formulés ci‑après, devant le greffier du Conseil privé, au bureau duquel il est déposé :

Je jure d’exercer (ou affirme solennellement que j’exercerai) avec fidélité, sincérité et impartialité, et au mieux de mon jugement, de mon habileté et de ma capacité, les fonctions et attributions qui me sont dévolues en ma qualité de commissaire de la concurrence. (Ajouter, en cas de prestation de serment : « Ainsi Dieu me soit en aide ».)

Traitement

(3) Le commissaire reçoit le traitement fixé par le gouverneur en conseil.

Enquête par le commissaire

10 (1) Le commissaire fait étudier, dans l’un ou l’autre des cas suivants, toutes questions qui, d’après lui, nécessitent une enquête en vue de déterminer les faits :

  • sur demande en vertu de l’article 9,
  • chaque fois qu’il a des raisons de croire :
    • soit qu’une personne a contrevenu à une ordonnance rendue en application des articles 32, 33 ou 34, ou des parties VII.1 ou VIII,
    • soit qu’il existe des motifs justifiant une ordonnance en vertu des parties VII.1 ou VIII,
    • soit qu’une infraction visée à la partie VI ou VII a été perpétrée ou est sur le point de l’être;
  • chaque fois que le ministre lui ordonne de déterminer au moyen d’une enquête si l’un des faits visés aux sous‑alinéas b)(i) à (iii) existe.

Renseignements concernant les enquêtes

(2) À la demande écrite d’une personne dont les activités font l’objet d’une enquête en application de la présente loi ou d’une personne qui a demandé une enquête conformément à l’article 9, le commissaire instruit ou fait instruire cette personne de l’état du déroulement de l’enquête.

Enquêtes en privé

(3) Les enquêtes visées au présent article sont conduites en privé.

Discontinuation de l’enquête

22 (1) Le commissaire peut, à toute étape d’une enquête visée à l’article 10, discontinuer l’enquête en question lorsqu’il estime que l’affaire sous étude ne justifie pas la poursuite de l’enquête.

Rapport

(2) Le commissaire, lorsqu’il discontinue une enquête, doit remettre au ministre un rapport écrit qui fait état des renseignements obtenus de même que du motif de la discontinuation de l’enquête.

Avis au requérant

(3) Dans les cas où une enquête menée à la suite d’une demande faite en vertu de l’article 9 est discontinuée, le commissaire informe le requérant de la décision et il lui en donne les motifs.

Révision de la décision

(4) Le ministre peut, de sa propre initiative ou à la demande écrite des requérants visés à l’article 9, réviser la décision du commissaire de discontinuer l’enquête prévue à l’article 10 et, s’il estime que les circonstances le justifient, il peut donner au commissaire l’ordre de poursuivre l’enquête.

Le ministre peut requérir un rapport provisoire

28 Le ministre peut requérir le commissaire de soumettre un rapport provisoire au sujet de toute enquête qu’il poursuit sous le régime de la présente loi, et il incombe au commissaire, lorsqu’il en est requis par le ministre, de présenter un rapport provisoire indiquant les mesures prises, la preuve obtenue et son opinion sur l’effet de la preuve.

Confidentialité

29 (1) Il est interdit à quiconque exerce ou a exercé des fonctions dans le cadre de l’application ou du contrôle d’application de la présente loi de communiquer ou de permettre que soient communiqués à une autre personne, sauf à un organisme canadien chargé du contrôle d’application de la loi ou dans le cadre de l’application ou du contrôle d’application de la présente loi :

  • l’identité d’une personne de qui des renseignements ont été obtenus en application de la présente loi;
  • l’un quelconque des renseignements obtenus en application de l’article 11, 15, 16 ou 114;
  • quoi que ce soit concernant la question de savoir si un avis a été donné ou si des renseignements ont été fournis conformément à l’article 114 à l’égard d’une transaction proposée;
  • tout renseignement obtenu d’une personne qui demande un certificat conformément à l’article 102;
  • des renseignements fournis volontairement dans le cadre de la présente loi.

Exception

(2) Le présent article ne s’applique ni à l’égard de renseignements qui sont devenus publics ni à l’égard de renseignements dont la communication a été autorisée par la personne les ayant fournis.

Communication au ministre des Transports

29.1 (1) Par dérogation au paragraphe 29(1), le commissaire peut, sur demande du ministre des Transports conforme au paragraphe (3), communiquer ou permettre que soient communiqués à celui‑ci les renseignements visés au paragraphe (2) qu’il demande.

Nature des renseignements

(2) Les renseignements que peut communiquer le commissaire sont :

  • l’identité d’une personne de qui des renseignements ont été obtenus en application de la présente loi;
  • tout renseignement recueilli dans le cours d’une enquête visée à l’article 10;
  • l’un quelconque des renseignements obtenus en application des articles 11, 15, 16 ou 114;
  • tout renseignement obtenu d’une personne qui demande un certificat conformément à l’article 102;
  • quoi que ce soit concernant la question de savoir si un avis a été donné ou si des renseignements ont été fournis conformément à l’article 114 à l’égard d’une transaction proposée;
  • tout renseignement, y compris les compilations et analyses, recueilli, reçu ou produit par le commissaire ou en son nom.

Demande du ministre

(3) La demande du ministre des Transports doit être faite par écrit et :

  • préciser les renseignements, parmi ceux qui sont mentionnés aux alinéas (2)a) à f), dont il a besoin;
  • indiquer que les renseignements lui sont nécessaires pour l’application des articles 53.1 ou 53.2 de la Loi sur les transports au Canada et préciser la transaction visée par ces articles.

Restriction quant à l’utilisation

(4) Les renseignements ne peuvent être utilisés que pour l’application des articles 53.1 ou 53.2 de la Loi sur les transports au Canada.

Confidentialité

(5) Il est interdit à quiconque exerce ou a exercé des fonctions dans le cadre de l’application ou du contrôle d’application de la Loi sur les transports au Canada de communiquer ou de permettre que soient communiqués des renseignements communiqués dans le cadre du paragraphe (1), sauf à une personne qui exerce des fonctions sous le régime des articles 53.1 ou 53.2 de cette loi.

Communication au ministre des Finances

29.2 (1) Par dérogation au paragraphe 29(1), le commissaire peut, sur demande du ministre des Finances conforme au paragraphe (3), communiquer ou permettre que soient communiqués à celui‑ci les renseignements visés au paragraphe (2) qu’il demande.

Nature des renseignements

(2) Les renseignements que peut communiquer le commissaire sont :

  • l’identité d’une personne de qui des renseignements ont été obtenus en application de la présente loi;
  • tout renseignement recueilli dans le cours d’une enquête visée à l’article 10;
  • l’un quelconque des renseignements obtenus en application de l’article 11, 15, 16 ou 114;
  • tout renseignement obtenu d’une personne qui demande un certificat conformément à l’article 102;
  • quoi que ce soit concernant la question de savoir si un avis a été donné ou si des renseignements ont été fournis conformément à l’article 114 à l’égard d’une transaction proposée;
  • les renseignements, y compris les compilations et analyses, recueillis, reçus ou produits par le commissaire ou en son nom.

Demande du ministre

(3) La demande du ministre des Finances doit être faite par écrit et :

  • préciser les renseignements, parmi ceux qui sont mentionnés aux alinéas (2)a) à f), dont il a besoin;
  • indiquer que les renseignements lui sont nécessaires pour lui permettre de décider, selon le cas :
    • s’il doit approuver une fusion ou un projet de fusion dans le cadre de la Loi sur les banques, de la Loi sur les associations coopératives de crédit, de la Loi sur les sociétés d’assurances ou de la Loi sur les sociétés de fiducie et de prêt,
    • s’il donne le certificat mentionné à l’alinéa 94b) à l’égard d’une telle fusion ou d’un tel projet de fusion;
  • préciser la fusion ou le projet de fusion.

Restriction quant à l’utilisation

(4) Les renseignements ne peuvent être utilisés que pour la prise de la décision concernant la fusion ou le projet de fusion.

Confidentialité

(5) Il est interdit à quiconque exerce ou a exercé des fonctions dans le cadre de l’application ou du contrôle d’application de la Loi sur les banques, de la Loi sur les associations coopératives de crédit, de la Loi sur les sociétés d’assurances ou de la Loi sur les sociétés de fiducie et de prêt de communiquer ou de permettre que soient communiqués les renseignements communiqués dans le cadre du paragraphe (1), sauf à une autre personne qui exerce de telles fonctions.

Exception

94 Le Tribunal ne rend pas une ordonnance en vertu de l’article 92 à l’égard :

  • d’un fusionnement en substance réalisé avant l’entrée en vigueur du présent article;
  • d’une fusion réalisée ou proposée aux termes de la Loi sur les banques, de la Loi sur les associations coopératives de crédit, de la Loi sur les sociétés d’assurances ou de la Loi sur les sociétés de fiducie et de prêt, et à propos de laquelle le ministre des Finances certifie au commissaire le nom des parties et certifie que cette fusion est dans l’intérêt public ou qu’elle le serait compte tenu des conditions qui pourraient être imposées dans le cadre de ces lois;
  • d’une fusion — réalisée ou proposée — agréée en vertu du paragraphe 53.2(7) de la Loi sur les transports au Canada et à l’égard de laquelle le ministre des Transports certifie au commissaire le nom des parties.

Observations aux offices fédéraux etc.

125 (1) Le commissaire peut, à la requête de tout office, de toute commission ou de tout autre tribunal fédéral ou de sa propre initiative, et doit, sur l’ordre du ministre, présenter des observations et soumettre des éléments de preuve devant cet office, cette commission ou ce tribunal, en ce qui concerne la concurrence chaque fois que ces observations ou ces éléments de preuve ont trait à une question dont est saisi cet office, cette commission ou cet autre tribunal et aux facteurs que celui‑ci ou celle‑ci a le droit d’examiner en vue de régler cette question.

Définition de office, commission ou autre tribunal fédéral

(2) Pour l’application du présent article, office, commission ou autre tribunal fédéral s’entend de tout office, toute commission, tout tribunal ou toute personne qui exerce des activités de réglementation et qui est expressément chargé, par un texte législatif du Parlement ou en application d’un tel texte, de prendre des décisions ou de faire des recommandations afférentes, directement ou indirectement, à la production, la fourniture, l’acquisition ou la distribution d’un produit.